mercredi 18 mars 2009

13 janvier 1935 : Anna fait le tour de la famille

"Ma chère petite Jane,
Nous vous remercions d'abord de vos voeux affectueux qui nous ont beaucoup touchés, espérant qu'ils se réaliseront non seulement pour nous, mais surtout pour vous, mes chers enfants ; car tout notre désir est de vous savoir en bonne santé et heureux. Qu'Henri réussisse pleinement et soit récompensé de toute la peine qu'il se donne dans son travail ; que vous puissiez enfin trouver une résidence vous donnant satisfaction complète (1). Mais avant tout, mon Janot, continue à te soigner et à te ménager le plus possible afin d'être désormais à l'abri de toute rechute.
Nous sommes bien désolés que ta femme de ménage soit malade et de tout l'ennui que tu as eu avec elle ; pourvu qu'elle soit revenue sans trop tarder, sans quoi tu en auras peut-être trouvé une autre ; nous redoutons tellement pour toi un excès de fatigue, et il faut l'éviter à tout prix.
Nous voyons avec grand plaisir combien vos chers petits ont été gâtés par tous, et nous voyons d'ici la joie de Jean au déballage de ses nombreux cadeaux. Tu dois apprécier son meilleur appétit ; l'air de l'Abadie lui est favorable et tu fais bien de le laisser jouer dehors une partie de la journée, même avec les voisins, et malgré l'accent !
Nous avons bien pensé à vous et à votre solitude lors de notre réunion du 1er de l'An. T. Henriette toussait beaucoup, et s'inquiétait de son état ; Denise allait bien, mais comme nous ne savons rien depuis et qu'Henriette n'est pas venue voir Gd Mère, ce qui m'étonne, je crains que ça n'aille pas bien pour elle !
Nous n'avons pas revu les cinq, et les attendons dimanche prochain avec les Rosenthal qui vont bien. (...)
Renée a eu une intoxication alimentaire après le Jour de l'An, et a été bien fatiguée et obligée de faire venir le Dr, souffrant de l'estomac, et ayant des nausées et étourdissements. Nous ne l'avons su qu'après, et de notre côté, ça n'allait pas non plus. J'ai été retenue à la maison pendant 8 jours par une grosse hémorroïde externe qui m'a fait beaucoup souffrir et qu'il a fallu soigner. Papa faisait le marché et la vaisselle, et juste au moment où j'allais mieux (heureusement) il a été arrêté par un gros rhume et n'est pas encore sorti. Du reste nous avons toujours un sale temps et pensons, non sans envie, à votre beau soleil ! Les journées sont tout de même longues, toujours à la maison, et on désirerait les beaux jours et un peu de satisfaction avec !... Nous croyons qu'il n'y a rien à attendre du côté de l'oncle Jean. Papa fera une démarche lui-même le mois prochain mais je n'ai pas grand espoir dans la réussite.
Jules est installé à Anvers avec Juliette chez Mme Lauman qui veut bien les loger jusqu'en mars (époque de l'Exposition à Bruxelles). Jules, sans place depuis la fin de l'été, et Juliette également, car on ne veut plus de femmes mariées comme domestiques à Anvers, elle fait de la couture chez ses soeurs et gagne sa nourriture ; et Jules tient compagnie à sa belle-mère !... Il ne trouve rien à faire nulle part, car on ne prend plus que des sujets belges ; mais comme il ne peut vivre sans manger, nous sommes forcés, bon gré mal gré, de nous exécuter une fois de plus. Toujours des tuiles dont on se passerait, surtout en ce moment !
Ta gentille carte à Gd Mère a eu grand succès et elle a voulu à toute force y répondre. La pauvre croit que tu es toujours une enfant et que tu vis avec moi ; tu sera sans doute surprise de ses réflexions ! Elle avait mis sur l'enveloppe : Melle Jeanne Jobert.
Il n'y a que Papa et moi qui sommes allés la voir pour le Jour de l'An.
Je termine, ma chérie, Papa se joint à moi pour vous embrasser tous les trois bien tendrement comme nous vous aimons. J'envoie de bonnes caresses à Petit Jean, et pour toi toute notre affection.
A. Beauser"

(1) Apparemment, la maison de l'Abadie n'avait pas l'eau courante.

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