jeudi 28 août 2008

21 mai 1931 : Des nouvelles de Suzy

"Ma chère Jane,
Cette lettre-là te trouvera-t-elle encore au Petit Nid ?? Voilà plusieurs fois que la sonnette nous donne un battement de coeur et que nous disons "ça y est". En tout cas pour être écrite si près de l'"évènement", ta longue lettre nous donne une haute idée de ton excellent moral.
Ta fille continue à faire notre bonheur, elle va toujours très bien et a bon appétit. Malheureusement ces derniers jour, chez nous aussi le temps s'est un peu gâté et les averses empêchent de se tenir au jardin comme on voudrait. Néanmoins nous sortons Suzy matin et soir et ces promenades lui donnent de belles couleurs.
Hier en rentrant elle a trouvé Tante Vulliod à la maison et lui a fait un brin de causette gentiment. Cette chère Tante a tiré de son sac un joli morceau de toile de Tarare bleue pour lui faire une robe, ce qui a rempli Suzy de joie. Elle venait de faire des robes à ses petites filles dans ce tissu et comme il lui en restait, elle a pensé que cela irait bien à la blondeur de Suz.
Elle lui a promis aussi de lui apporter des bonbons à sa prochaine visite. Aussi, lorsqu'elle est partie, Suzy l'a accompagnée jusqu'à la porte en lui répétant : "tu m'apporteras des bonbons", ce qui m'a rappelé le temps où Riron (1) en petit jupon courait après Madame Gras en lui criant "Gras, tu m'apporteras des gâteaux la prochaine fois". Ce que c'est que l'hérédité !
Nous avons reçu une longue lettre de Germaine qui a l'air très heureuse en mission, malgré le temps plus ou moins pluvieux. Kozak va partir à Padoue les premiers jours de juin et sa femme ira se garer à Nîmes. Elle viendra nous dire bonjour en passant.
Nous allons avoir la Nourrice quelques jours à la maison la semaine de la Pentecôte. C'est une vieille connaissance que l'on voit à peu près tous les dix ans. La petite va l'amuser.
En même temps que la tienne nous avons eu une lettre d'André qui paraît toujours bien content. Nous aurons peut-être le plaisir de voir sa pomme bientôt. Suzy en parle quelquefois, elle sait très bien qu'il est à Antibes et qu'il l'appelle "Périe" (2).
Tout à l'heure, elle a demandé "Où est-elle habitée Maman ?" - "à Nice" - "bon, bon." Elle soigne tendrement sa poupée et lui dit "Bouge pas, allons, peux pas boutonner".
Comment va l'"appendicite" de ce vieux frère ? A-t-il trouvé une pâture du matin à sa convenance ?
A bientôt. Nous vous embrassons tendrement tous les deux.
Colombe"


(1) Surnom d'Henri quand il était petit

(2) D'après Isabelle, déformation de "prairie" en référence à la blondeur de Suzy

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