mercredi 16 juillet 2008

30 avril 1929 : La fée arrive à Montchat

"Mes chers enfants,
Combien nous les attendions, ces chères nouvelles ! On dit toujours : il peut y avoir une lettre perdue, mais on n'en croit que la moitié et on commence à s'inquiéter...
Enfin, vous êtes bien gentils et voici deux bonnes lettres dans une, et le bon espoir d'un jour de grâces pour Henri à la Pentecôte et de plusieurs bons jours de ses deux chéries. Nous allons faire reposer Jane si elle est un peu lasse et nous pouponnerons notre Petite à qui mieux mieux. Je ne m'effraie pas de sa sauvagerie pour les étrangers ; elle se sentira tant aimée par ici qu'elle ne gardera pas longtemps sa méfiance instinctive.
Nous ne la gâterons pas, la chère mignonne, mais nous tâcherons de l'intéresser et maintenant ce doit être facile.
Bravo pour la petite dent qui sans doute ne tardera pas à avoir sa voisine. Cette apparition plutôt précoce est un bon signe et donne plus de latitude pour la nourriture.
Le cher Kozak est en route sur mer aujourd'hui et très probablement il filera sur Nice avant de venir ici, cédant à votre invitation et à son désir très grand de vous voir davantage mais il peut y avoir des accrocs dans les projets, ne vous réjouissez pas trop vite pour n'être pas déçus. Ensuite, qu'Henri tâche bien de tenir son samedi, pour que nous ne soyons pas volés.
Pendant que j'écris, on tape contre la maison, dans la rue, pour faire la place des coffrets d'électricité. (...) Dans tous les cas, l'offre de nous avoir des fournitures en gros nous fait bien plaisir et je suivrai le conseil de nous documenter à la Compagnie, quai des Célestins. Après quoi je vous écrirai et peut-être qu'avec François vous pourrez calculer à peu de choses près la quantité de matériel. Je crois que la grosseur du fil à 16/10 est obligatoire.
C'est notre locataire qui est heureux de l'évènement ! Et pour nous cela ressemble à un conte de fées.
J'espère que vous n'aurez pas de déceptions avec V. (1) pour l'arrangement survenu. Dans tous les cas, ne vous en faites pas de souci, ce serait le plus grave de l'affaire et ni François ni moi ne sommes pressés des avances faites. Et cela me fait grand plaisir que le travail chez Michel ne donne pas de préoccupations pénibles.
Vous faites joliment bien de prendre vos ébats le dimanche dans de si jolis pays. Quels bons souvenirs j'en ai gardés, pour ma part.
Ici le jardin devient agréable, les lilas sont en pleine floraison, et nous avons eu de si jolies fleurs de pêchers et poiriers sur l'herbe verte ! C'était ravissant, mais il ne fait pas chaud ces derniers jours et l'on ne peut guère stationner dehors étant assis. Il n'en faut qu'une et la chaleur est là. (...)
De Paris nous avons appris la naissance d'une petite fille chez Paul et Violette et tout va bien sauf qu'il n'y a pas encore de petit Dumas à l'horizon. La naissance date du 25.
Marthe va son petit train-train sans grand enthousiasme à cause du personnel. Enfin, demain, jour sans tramways, elle aura sa journée et que de choses pour la remplir, trop pour en venir à bout.
A bientôt les petites histoires menues de chaque jour : 17 jours, mes chers Jane Henri Suzanne, et nous vous possédons.
Il y a longtemps que vous ne nous avez donné des nouvelles de vos parents. Ce sera pour la prochaine lettre, n'est-ce pas ?
J'espère qu'ils vont tous bien et que votre soeur a fait bon voyage ainsi que son petit Pierre.
Allons, à bientôt, et mille tendresses.
Maman"


(1) Villiet, ex-associé d'Henri.

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